La chirurgie sans chirurgie – cela ressemble à une énigme, mais c’est ce que le Dr Vimoj Nair fait tous les jours à L’Hôpital d’Ottawa. En tant que radio-oncologue, le Dr Nair se spécialise dans la radiochirurgie, une forme de radiation extrêmement précise qui ne nécessite aucune incision. En utilisant une nouvelle technologie passionnante comme le cyberbistouri (CyberKnife) et en menant des recherches qui changent la pratique, le Dr Nair modifie la façon dont certains cancers sont traités et, en fin de compte, obtient de meilleurs résultats pour les patients de L’Hôpital d’Ottawa et d’ailleurs.
Poursuivez votre lecture pour découvrir pourquoi le Dr Nair a choisi la médecine et comment le domaine a évolué depuis ses débuts.
Q : Pouvez-vous nous parler un peu de votre enfance?
R : Je suis né au Kerala, un magnifique État de l’Inde du Sud. Mon père était comptable dans une entreprise américaine; j’ai donc commencé à voyager dès mon plus jeune âge, et je pense que tous ces voyages ont fait de moi un citoyen du monde.
J’ai certes fait toute ma scolarité au Kerala; mes matières préférées étaient les mathématiques et les sciences. Les STIM étaient pour moi un jeu d’enfant – je suis un peu technomaniaque. Vers l’âge de 15 ans, j’ai commencé à m’intéresser aux ordinateurs et au codage, et j’ai obtenu un diplôme en applications informatiques. Au début des années 90, avoir un ordinateur était un luxe, et il n’y avait pas encore d’Internet à haut débit, donc je ne pouvais obtenir que très peu d’informations, mais c’est en partie ce qui rendait les choses si amusantes. Plus tard, je pense que cette expérience précoce avec les ordinateurs m’a amené à une identité où les intersections de la médecine pure et de la technologie pouvaient changer des vies.
Q : Quand avez-vous décidé d’étudier en médecine et de devenir médecin?
R : En raison de mon grand intérêt pour tout ce qui touche aux STIM, je ne savais pas vers quoi m’orienter. J’ai suivi des cours de mathématiques et de biologie, et j’ai envisagé l’ingénierie logicielle et la médecine pour mes études universitaires, mais avec tout ce que j’avais vu en grandissant, j’ai pris conscience que la meilleure façon d’aider mes semblables dans n’importe quelle partie du monde était de devenir médecin.
Je pense que je me suis orienté vers la radio-oncologie parce que c’est la combinaison parfaite des mathématiques, de la physique et de la médecine – elle mélange tout à la bonne dose précise.
— Dr Nair
Q : Comment vous êtes-vous retrouvé à L’Hôpital d’Ottawa?
R : J’ai toujours pensé que je finirais par travailler aux États-Unis. Après ma résidence en radio-oncologie dans le nord de l’Inde, j’ai suivi une formation en neuro-oncologie au Tata Memorial Hospital de Mumbai, le plus grand centre de cancérologie d’Asie. Pendant ma formation, j’ai été sélectionné pour la bourse de la Société américaine de brachythérapie au Texas. La cérémonie de remise des prix a eu lieu à Toronto, après quoi j’ai effectué mon stage d’un mois au Texas. Cet arrêt au Canada m’a fait comprendre que je voulais vivre ici, que c’était là que je voulais que mes enfants grandissent. J’ai fait une demande d’immigration tout en terminant mon internat en Inde, et j’ai déménagé ici pour devenir le premier boursier CyberKnife à l’Hôpital d’Ottawa.
Q : Comment le domaine de la radio-oncologie a-t-il évolué depuis vos débuts?
R : Tout comme les téléphones portables d’aujourd’hui sont différents de ceux des années 1990, le domaine de la radio-oncologie a énormément évolué. C’est un domaine dans lequel nous avons adopté simultanément du matériel et des logiciels, et nous avons donc connu d’énormes changements technologiques qui signifient que la précision avec laquelle nous ciblons le cancer est passée de centimètres à des millimètres, et maintenant à moins d’un millimètre. Le dosage et la précision se sont énormément améliorés.
Nous avons assisté à l’introduction de la radiochirurgie, de l’intelligence artificielle et de la réalité virtuelle. L’Hôpital d’Ottawa a rapidement adopté la technologie, et nous avons été l’un des premiers centres au monde à développer notre propre système de réalité virtuelle pour améliorer la délimitation de la cible – ou le tracé de la cible – pour le traitement pendant la radiothérapie du cancer.
Q : Vous vous êtes occupé d’Erin Brown; qu’est-ce qui a rendu sa situation si unique?
R : Dans le cas d’Erin, il s’agissait d’une jeune femme brillante atteinte d’une tumeur agressive et rare qui avait été en grande partie enlevée chirurgicalement avant qu’elle vienne me voir pour une radiothérapie. Nous savions que si nous faisions quelque chose de trop ciblé, la tumeur reviendrait au niveau du site chirurgical. Nous ne voulions pas non plus aller trop loin au risque d’endommager inutilement le tissu cérébral normal environnant. Imaginez un arbre au milieu d’une pelouse : le chirurgien a arraché l’arbre – ou retiré la tumeur – et j’ai dû m’attaquer aux racines laissées dans la pelouse; la pelouse étant le cerveau de la patiente. L’art de la science consistait à savoir ce qu’il fallait épargner. Nous voulions protéger son centre de la mémoire pour qu’elle puisse mener une vie professionnelle et personnelle épanouie et heureuse.
De nombreuses années plus tard, elle a eu une récidive dans une autre partie de son cerveau, loin du site d’origine, ce qui suggère que les cellules ont migré à travers le liquide cérébral.
Comme la tumeur est réapparue après deux séries d’interventions chirurgicales sur ce site entièrement nouveau, nous avons dû intensifier l’irradiation de cette zone pour éviter qu’elle ne se développe à nouveau.
L’administration d’une deuxième série de radiations à un jeune cerveau pose davantage de problèmes techniques. Grâce à la technologie dont nous disposons dans le cadre du programme de radiothérapie de L’Hôpital d’Ottawa et à l’équipe de calibre mondial qui possède des décennies d’expérience, nous sommes certes en mesure de répéter avec succès l’irradiation du cerveau avec d’excellents résultats, en épargnant le centre de la mémoire.
J’ai été très heureux de voir Erin terminer ses études et devenir infirmière ici même, à L’Hôpital d’Ottawa.
Q : En tant que chercheur clinicien à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, sur quoi travaillez-vous actuellement?
R : Comme je suis un radio-oncologue polyvalent, je touche à beaucoup de choses. En ce moment, je travaille sur un essai clinique inédit au monde portant sur le rôle du microbiome intestinal dans le cancer du cerveau avec mon collaborateur, le Dr Terry Ng. Une autre étude innovante a été menée avec des collaborateurs, le Dr Jean-Philippe Thivierge de l’École de psychologie de l’Université d’Ottawa et le Dr Janos Szanto (aujourd’hui à la retraite), sur la physique des rayonnements pour voir ce que les rayonnements font aux cellules cérébrales et comment nous pouvons les utiliser comme un scalpel indolore dans les cas non cancéreux. Nous étudions également divers médicaments susceptibles de réduire les effets secondaires et d’améliorer l’efficacité des radiations. Toutes ces recherches sont financées par des donateurs ou par l’obtention de subventions concurrentielles.
Q : Quelle importance revêt le soutien communautaire dans l’avancement de vos travaux de recherche à L’Hôpital d’Ottawa?
R : Nous avons la chance de vivre dans une ville où les gens croient en la nécessité de donner en retour à la collectivité. Lorsque j’ai commencé à travailler ici, en 2011, j’ai pu contribuer à la collecte de fonds pour des travaux de recherche utilisant le cyberbistouri. Aujourd’hui, les recherches novatrices que je mène sur le microbiome intestinal ou l’effet des radiations sur le cerveau ne sont possibles que grâce à la générosité de donateurs des environs.
Q : Où peut-on vous trouver quand vous ne travaillez pas?
R : Je passe du temps avec ma femme et mes deux enfants. J’aime apprendre tout ce qui sort de ma zone de confort. La technologie, l’économie, la technologie spatiale, la technologie médicale, et j’en passe. En famille, nous passons beaucoup de temps à lire et à discuter de ces sujets. En même temps, nous avons pour principe de nous déconnecter de la technologie et de voyager pour découvrir davantage notre belle planète bleue. Nous adorons voyager, que ce soit au Canada ou dans toutes les parties du globe – de la randonnée sur la montagne Montserrat à Barcelone à l’ascension exténuante de la Grouse Mountain à Vancouver (que les gens appellent communément le Stairmaster de mère Nature).