Mener le bon combat sur le plan de travail du laboratoire ou au chevet du patient : Le Dr Michael Ong, oncologue et professeur agrégé à l’Hôpital d’Ottawa, consacre sa carrière à découvrir de nouvelles thérapies contre le cancer en faisant participer des patients à des essais cliniques.
Ses travaux de recherche et sa pratique se concentrent sur le cancer de la prostate, le cancer de la vessie et le mélanome. Au cours de la dernière décennie, il a été l’enquêteur principal à Ottawa dans le cadre d’innombrables essais cliniques. Il dirige actuellement plusieurs essais cliniques nationaux et internationaux qui sont sur le point de changer la façon dont nous traitons le cancer, y compris celle dont nous utilisons l’immunothérapie du cancer, où le système immunitaire du patient est exploité pour s’attaquer au cancer. Les travaux de recherche du Dr Ong changent la manière dont nous prodiguons les soins à L’Hôpital d’Ottawa et bien au-delà.
Poursuivez votre lecture pour savoir ce qui a suscité l’intérêt du Dr Ong pour la science et pourquoi l’immunothérapie fonctionne un peu différemment avec le cancer de la prostate qu’avec d’autres cancers.
Q : Parlez-nous un peu de votre jeunesse.
R : Je suis né et j’ai grandi à London, en Ontario, un endroit où il fait bon vivre. Mon père y était dentiste et ma mère s’occupait de son cabinet. J’ai passé une bonne partie de ma jeunesse à jouer et à participer à des festivals de piano classique. Je faisais également partie de l’équipe de tennis et de badminton de mon école, et j’aimais faire partie du conseil étudiant.
J’étais abonné à Scientific American, et c’était super parce qu’on y explorait le monde et l’univers. Mon père aimait la science-fiction, et c’était une tradition familiale de regarder Star Trek chaque semaine avec lui et mon frère : c’était notre temps à nous, entre garçons.
À l’école secondaire, alors que tout le monde cherchait sa voie, je savais que je finirais dans les sciences – bien que le domaine soit tout simplement immense. À l’époque, nous n’avions pas Internet et il était difficile de savoir quelles étaient les carrières possibles.
Q : Quand avez-vous pris conscience que vous vouliez devenir médecin, et plus précisément oncologue?
R : La médecine ouvre de nombreuses portes, et je pense que c’est ce qui m’a initialement attiré dans ce domaine. Je devais décider si je voulais rester à London et reprendre le cabinet dentaire de mon père, mais je savais que le parcours de la médecine m’ouvrirait l’esprit par le biais d’expériences et d’aventures variées, et il a absolument tenu cette promesse.
« La diversité des personnes et des patients que j’ai rencontrés au cours de ma carrière, dans des situations à la fois stressantes et miraculeuses, a dépassé la dramatique et n’importe quelle série télévisée. »
— Dr. Michael Ong
Ma formation médicale m’a conduit dans presque toutes les provinces du Canada et toute l’Europe. La diversité des personnes et des patients que j’ai rencontrés au cours de ma carrière, dans des situations à la fois stressantes et miraculeuses, a dépassé la dramatique et n’importe quelle série télévisée.
Pendant mes études de premier cycle, j’ai étudié la biochimie à l’Université Western, ce qui a probablement jeté les bases de ce que je fais actuellement en oncologie médicale. Mais ce n’est que lorsque j’ai fait ma résidence en médecine interne, à la recherche de ma raison d’être, que j’ai eu une rotation sélective inattendue en oncologie. J’ai trouvé ma vocation. Il y avait tant de choses qui m’enthousiasmaient dans ce domaine : l’approche compatissante et hautement spécialisée de l’équipe envers les patients, l’approche multidisciplinaire, l’approche scientifique fondée sur des preuves, l’importance incroyable accordée à la recherche et à l’amélioration des résultats, la crème de la crème de la science, ce qui s’est traduit par des milliards de dollars à la recherche.
Aujourd’hui, 15 ans après avoir pris la décision de rejoindre ce domaine, j’ai assisté à de véritables révolutions dans la manière dont nous traitons le cancer.
Q : Qu’est-ce qui vous attiré vers l’oncologie?
R : J’avais un excellent mentor, le Dr Eric Winquist, qui avait vu quelque chose en moi, et m’a encouragé à m’inscrire à un programme de formation à la rédaction et à la conduite d’essais cliniques sur le cancer à Flims, en Suisse, sous l’égide de l’American Academy of Cancer Research. Dans le cadre de ce programme, il fallait présenter une proposition d’essai clinique, affiner les concepts, les rendre réalisables et rédiger un protocole d’essai clinique d’une centaine de pages que l’on ramenait dans son établissement pour mener l’étude. Ma demande d’essai clinique retenue, me voilà parti pour la Suisse cet été-là!
C’est là, au milieu des Alpes suisses, que le professeur Johann de Bono, sans doute l’un des oncologues les plus influents et avant-gardistes au monde en matière de cancer de la prostate, a dirigé mon groupe de formation. À la fin du cours, il m’a dit : « Mike, quels sont tes projets? J’aimerais que tu viennes travailler pour moi à l’hôpital Royal Marsden de Londres, au Royaume-Uni ».
J’ai passé deux ans à Londres, à l’institut de recherche sur le cancer, où j’ai développé de nouveaux traitements contre le cancer. C’était époustouflant d’être témoin de ce qui se passait dans ces établissements de pointe, et de voir comment on pouvait faire passer la science du plan de travail directement au chevet du patient. J’ai appris à concevoir des essais cliniques qui, une fois publiés et présentés, modifient la pratique clinique dans le monde entier.
Q : Parlez-nous des travaux de recherche sur lesquels vous travaillez en ce moment.
R : Je suis spécialiste des essais cliniques en cancérologie. Les patients, le personnel et les chercheurs doivent déployer des efforts considérables pour s’inscrire et participer aux essais cliniques, mais c’est en fin de compte l’un des meilleurs moyens de modifier de manière significative les soins prodigués aux patients. Je me concentre sur l’accès aux essais cliniques qui testent de nouvelles thérapies immunitaires et ciblées pour les patients atteints d’un cancer de la prostate, d’un cancer de la vessie et d’un mélanome.
Pour le cancer de la prostate, j’essaie de mettre au point des traitements personnalisés qui ne se contentent pas d’une approche unique. Je dirige une étude internationale aux États-Unis et au Canada pour montrer que la meilleure façon d’ajouter une chimiothérapie aux thérapies hormonales est d’examiner un certain antigène pour rechercher des signes précoces de résistance au traitement. Notre objectif dans cet essai clinique est de prouver que lorsque nous personnalisons le choix de la chimiothérapie, nous améliorons la durée et la qualité de vie des patients cancéreux.
Je copréside également une étude nationale que nous avons terminée au Canada et dans le cadre de laquelle nous avons essayé de personnaliser le traitement des hommes atteints d’un cancer de la prostate en utilisant un test sanguin appelé « ADN tumoral circulant ». Nous avons testé divers nouveaux traitements anticancéreux sur la base des résultats de ce test sanguin et nous avons constaté que nous pouvions choisir efficacement les patients susceptibles de bénéficier de traitements spécifiques, tels que l’immunothérapie du cancer.
Q : Pourquoi l’immunothérapie est-elle plus efficace pour certains types de cancer?
R : La raison pour laquelle les immunothérapies fonctionnent est que certains cancers sont très laids pour le système immunitaire d’une personne, et que ce dernier les considère naturellement comme étrangers et tente d’attaquer le cancer. Les cancers se couvrent alors d’une substance appelée PD-L1, qui est comme une cape invisible pour le système immunitaire : il s’agit d’un instinct de survie pour les cancers. Les immunothérapies éliminent cette cape PD-L1 au moyen d’une perfusion intraveineuse administrée aux patients, ce qui révèle à nouveau le cancer au système immunitaire, et les résultats peuvent être incroyables.
Nous avons eu du mal à faire fonctionner l’immunothérapie dans le cas du cancer de la prostate, car ce cancer ne se révèle au système immunitaire que dans un petit nombre de cas, dans probablement moins de 5 %. Nous avons réalisé de nombreux essais, mais la majorité des patients ne bénéficient pas de l’immunothérapie. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faille renoncer à cette approche! Cela signifie que nous devrions adopter une approche personnalisée pour les patients et faire des tests pour identifier les 3 à 5 % de patients qui pourraient en bénéficier. Une étude récente a montré que l’immunothérapie était bénéfique pour 86 % des patients atteints d’un cancer de la prostate dont le test était positif à ce que l’on appelle le « déficit de la réparation des mésappariements », que je dépiste dans ma pratique, mais ce n’est pas encore la norme au Canada de le dépister.
Q: Vous avez travaillé sur le cas de cancer de la prostate de Larry Trickey. Pourquoi sa situation était-elle unique?
R : Le cas de Larry illustre parfaitement à quel point il est important de trouver ces cas de déficit de la réparation des mésappariements. Larry a participé à un essai clinique au cours duquel nous avons prélevé un échantillon de sang et testé l’ADN de son cancer pour y déceler les signes d’un tel déficit. Les résultats de ses analyses de sang ont montré qu’il était peut-être sensible à l’immunothérapie. Il s’est inscrit à l’essai clinique, qui utilise deux immunothérapies du cancer. Presque dès le début du traitement, son cancer a été attaqué par son système immunitaire et il est jusqu’à présent en rémission complète de son cancer.
Il est important de ne pas traiter le cancer de la prostate comme un grand panier. L’hormonothérapie est très importante, la chimiothérapie l’est aussi pour certains, mais il y a aussi la radiothérapie, les immunothérapies et les thérapies ciblées telles que les inhibiteurs de PARP qui ne profitent qu’aux personnes dont les gènes sont altérés, comme le BRCA2. Nous faisons des efforts considérables pour personnaliser le traitement des patients.
Q : Pourquoi avez-vous choisi de travailler à L’Hôpital d’Ottawa?
R : Ma femme (également médecin) et moi avons choisi de revenir à Ottawa et, à l’époque, notre premier fils avait un an. Nous voulions travailler dans un centre offrant des soins de premier ordre, ce qui signifiait pour moi un centre capable de mettre au point des médicaments contre le cancer et de mener des essais cliniques de phase I à III sur le cancer.
Nous voulions également équilibrer notre vie dans une ville qui offrirait tout ce qu’il faut pour aider notre famille à s’épanouir. Notre deuxième enfant est né environ deux ans après avoir commencé à exercer à Ottawa.
Je dirais également que j’ai le privilège de travailler avec certains des collègues les plus incroyables de la Division d’oncologie médicale. Il serait difficile de trouver un groupe de personnes plus talentueuses, plus dévouées et plus compatissantes.
Q: Où peut-on vous trouver quand vous ne travaillez pas?
R : J’essaie de m’améliorer en tant qu’artiste de piano jazz. Je suis pianiste de formation classique, mais me lancer dans le jazz est l’une des choses les plus difficiles que j’aie jamais faites. Je compare cela à l’apprentissage d’une langue complètement différente.
Je joue aussi régulièrement au tennis et au squash. Je sors beaucoup avec mes deux garçons, qui participent tous les deux à des compétitions de football et de tennis. Ma femme est une grande skieuse, nous sommes donc sur les pistes toutes les fins de semaine en hiver.
J’aime voyager : cet été, je suis allé en Irlande, au Québec, à New York, à Barcelone, à Majorque, à Victoria et à Whistler; comme j’adore prendre des photos, je documente ainsi mes voyages!
Fait anecdotique : dans ma jeunesse, j’ai aussi fait des efforts pour apprendre à danser la salsa, et mes amis et moi nous rendions à des conférences pour le faire. La première fois que j’ai rencontré ma femme (nous parlons de 1998!), mes amis et moi l’avons emmenée dans un club de salsa, ce qui, je pense, m’a valu quelques points supplémentaires.