Lorsqu’une personne venant de subir un traumatisme franchit les portes de L’Hôpital d’Ottawa, l’équipe de la Dre Jacinthe Lampron passe à l’action. En tant que directrice médicale de la Traumatologie et chercheuse clinicienne, la Dre Lampron s’efforce constamment d’améliorer les soins de traumatologie, que ce soit directement auprès des patients ou par l’entremise de ses recherches sur l’amélioration de la qualité.
Lorsque chaque seconde compte, la Dre Lampron est celle qui les compte en prodiguant chaque jour des soins qui sauvent des vies.
Poursuivez votre lecture pour découvrir ce qui a attiré la Dre Lampron vers la traumatologie, ce qu’elle a appris en Afghanistan et ce qu’elle aurait pu devenir si elle n’avait pas opté pour la médecine.
Q : Parlez-nous de votre enfance.
R : Je suis née dans la région de Trois-Rivières, au Québec, et j’ai grandi à Nicolet sur une ferme laitière. Il y avait beaucoup de travail à faire, mais je faisais de mon mieux pour aider mes parents. C’était un peu difficile pour un enfant ou un adolescent parce que j’étais loin de la ville et des activités parascolaires – je faisais de la natation, de la randonnée et de l’escalade. En revanche, j’avais aussi beaucoup d’espace pour courir et faire d’autres expériences, comme conduire un tracteur.
À l’école, j’aimais tout ce qui touchait aux sciences. Au cégep, j’ai étudié la biochimie, les mathématiques, la physique et la biologie. J’aimais apprendre et essayer de comprendre des choses ou de résoudre des équations.
Q : Quelle profession vous attirait quand vous étiez jeune?
R : À quatre ans, je voulais devenir fleuriste. À la ferme, nous avions un grand potager et un grand jardin de fleurs. Ma grand-mère habitait à côté et je passais beaucoup de temps avec elle. Nous regardions les fleurs et mon prénom, Jacinthe, est le nom d’une fleur. Je suppose que c’est à ce moment-là que j’ai commencé à m’intéresser aux fleurs.
Q : Comment êtes-vous devenue médecin et chirurgienne généraliste en traumatologie?
R : Pour ce qui est de la médecine, il y a eu une progression. Tout allait bien à l’école et au cégep, et certains amis m’ont dit : « Et si on essayait la médecine? ». Je n’y connaissais pas grand-chose à l’époque, mais le domaine semblait intéressant, stimulant et susceptible de me permettre d’aider autrui. C’est pourquoi j’ai suivi cette filière.
Ensuite, en tant qu’étudiante en médecine, j’ai apprécié tous les sujets abordés. Je me souviens de m’être dit que j’allais avoir de la difficulté à choisir une spécialité. Puis, nous avons commencé les stages cliniques. Mon premier était en chirurgie générale. C’était très passionnant de voir à quoi ressemblait le milieu hospitalier, de rencontrer des patients et de prendre soin d’eux. Je ne connaissais rien d’autre encore – c’était mon premier stage – mais aucun autre domaine n’a été aussi inspirant. À la fin de l’année, c’était le stage en chirurgie générale qui m’avait davantage plu.
Je me souviens que j’ai travaillé avec une équipe de résidents brillants, ambitieux et motivés. Je les aime toujours beaucoup et, lorsque j’interagis avec eux sur le plan professionnel, je suis toujours émerveillée.
Q : Pouvez-vous nous parler de vos deux missions en Afghanistan en tant que médecin civile et de leur incidence sur votre approche de la médecine?
R : C’était très différent. La salle d’opération n’était pas aussi avancée sur le plan technologique que la nôtre, mais il y avait tout ce dont j’avais besoin pour opérer et aider les blessés. L’hôpital était fait de conteneurs maritimes et de contreplaqués et il y avait de gros blocs de ciment pour éviter les attaques à la roquette!
La base militaire était assez grande – près de 10 000 personnes y vivaient – et elle était multinationale. C’était très intéressant de voir autant de gens de pays différents au même endroit. Le personnel militaire de la base devait porter une arme, mais tout le monde devait porter une veste pare-éclats, qui est une sorte de gilet de protection balistique. De temps en temps, il y avait une attaque à la roquette – une alarme retentissait et tout le monde allait dans le bunker jusqu’à ce que l’alerte soit levée.
C’était évidemment très tragique et dramatique. Je ne peux pas dire que je me sentais heureuse en pleine guerre, mais j’étais contente du travail que je pouvais faire. J’ai appris que nous pouvions faire des chirurgies avec peu de moyens.
Les soins de traumatologie évoluent avec les guerres. Le conflit en Afghanistan a révélé de nouveaux concepts qui ont ensuite été transposés aux soins aux civils. Il a notamment modifié la façon dont nous pratiquons la réanimation : nous avons commencé à utiliser davantage de produits sanguins au lieu de solutions cristalloïdes. De plus, bien que l’utilisation des garrots ait évolué au fil des ans, l’Afghanistan nous a montré qu’il était très avantageux pour sauver des vies. Nous les utilisons donc plus souvent maintenant.
Q : Pouvez-vous nous parler d’un volet particulièrement intéressant des soins de traumatologie?
R : Notre équipe vit au rythme de la ville et de la société. Le jour de la fête du Canada, nous sommes prêts à intervenir parce que nous savons qu’il se passe beaucoup de choses. En automne, saison où bien des gens installent leurs guirlandes de Noël, nous savons qu’il survient malheureusement de nombreuses chutes. Au mois de mai, les motos commencent à peine à circuler, mais il y a déjà plus d’accidents. Nous vivons au rythme des saisons et des événements.
Q : Vous avez collaboré au cas de Brandon Peacock, une victime innocente d’une fusillade au volant d’une voiture. En quoi était-ce un cas unique?
R : Cet épisode de soins a été très intense. Il avait un traumatisme pénétrant. Ce type de traumatisme est très intense, surtout si un vaisseau sanguin est touché. Dans ce cas, la personne peut se vider de son sang en quelques minutes. La prise en charge d’une telle blessure nécessite beaucoup de ressources : du sang pour les transfusions, une salle d’opération préparée et une équipe prête pour effectuer toutes les tâches nécessaires à la réanimation. Tout le monde agit rapidement. Tout le monde doit savoir ce qu’il fait. C’est ainsi que nous sauvons des vies. Nous avons un système en place et une équipe prête à intervenir. C’est pourquoi les patients traumatisés s’en sortent mieux s’ils sont traités dans un centre de traumatologie.
Q : En tant que chercheuse clinicienne à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, à quels projets travaillez-vous à l’heure actuelle?
R : Je m’efforce d’améliorer la qualité des soins de traumatologie. Nous examinons les indicateurs de rendement et, si nous ne sommes pas au niveau de nos pairs, nous disséquons les données et examinons ce que nous pouvons faire pour essayer d’améliorer la situation. Nous réalisons alors un projet d’amélioration de la qualité et vérifions si la situation s’améliore. J’essaie également d’améliorer le système de traumatologie, c’est-à-dire de faciliter le cheminement des patients et les processus.
Ce type de recherche permet aux patients de recevoir des soins de meilleure qualité.
Q : En quoi le fait de disposer des installations les plus avancées sur le plan technologique fait-il la différence dans votre travail?
R : En traumatologie, nous avons surtout besoin d’une équipe bien formée qui travaille de concert. Le nouveau campus répondra à ce besoin. Il y aura des salles d’opération ultramodernes, un accès aux technologies les plus efficaces et un espace pour l’enregistrement vidéo et la simulation afin de former des membres de l’équipe. L’autre élément important est le nouvel héliport : au lieu de traverser la rue, comme nous le faisons actuellement, les hélicoptères pourront atterrir sur le toit. C’est essentiel parce que chaque seconde compte en cas de traumatisme.
Q : Que faites-vous quand vous n’êtes pas à l’hôpital?
R : Je fais du vélo, de la course à pied, de la cuisine ou je passe du temps avec ma fille de neuf ans.