L’admirateur de Jacques Cousteau nous plonge dans les profondeurs de la médecine régénératrice
Entretien avec le Dr Michael Rudnicki, membre de la Société royale, à L’Hôpital d’Ottawa
Le Dr Michael Rudnicki est en train de changer notre conception des cellules souches et de la médecine régénératrice. Qu’il s’agisse de ses découvertes en matière de cellules souches musculaires ou encore de son travail d’avant-garde concernant les méthodes thérapeutiques pour les maladies amyotrophiques, le Dr Rudnicki vulgarise ses découvertes en laboratoire auprès des patients. Ses recherches révolutionnaires et salvatrices ont été récompensées à maintes reprises par l’octroi de distinctions et de prix. Il occupe actuellement le poste de scientifique principal et de directeur du Centre de recherche sur les cellules souches Sprott – un volet clé de notre Programme de médecine régénératrice de pointe à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa, qu’il dirige également.
Apprenez aussi comment le Dr Rudnicki s’est retrouvé dans le domaine sans cesse changeant de la médecine régénératrice – et comment il est devenu l’un des 12 seuls Canadiens à faire partie de la Société royale.
Q : Pourquoi avoir choisi la médecine régénératrice?
R : Durant mon adolescence, mon frère et moi aimions beaucoup Jacques Cousteau. Je voulais devenir biologiste de la vie marine et travailler sous l’eau en portant un scaphandre. En grandissant, j’ai lu The Selfish Gene, un roman de Richard Dawkins, traitant notamment de la théorie de l’évolution et de l’origine de l’évolution du séquençage des gènes et de l’ADN. Ce livre m’a littéralement fasciné; j’ai voulu en savoir plus sur cette nouvelle science qu’était la biologie moléculaire, l’étude des gènes et de l’ADN. C’est le cursus universitaire que j’ai alors choisi de suivre.
J’ai étudié la biologie moléculaire à I’Université d’Ottawa, une matière qui m’a été enseignée par des professeurs exceptionnels, dont certains avaient été formés par les meilleurs scientifiques du moment. En quatrième année, j’ai commencé à travailler dans un laboratoire, et cette expérience m’a vraiment ouvert les yeux.
Q : Qu’est-ce qui motive vos recherches?
R : Dans le domaine scientifique, au début on vous inonde d’information, et on commence petit à petit à se rendre compte qu’on ne connaît qu’une infime partie de ce qu’il faut savoir. Et une fois que l’on commence à travailler dans un laboratoire, c’est comme si on passait de l’apprentissage des gammes à celui de la musique, parfois même en improvisant.
Dans ma jeunesse, ce qui m’a incité à suivre cette voie, c’était l’exaltation de la découverte, le fait de comprendre le fonctionnement des choses. Une expérience très gratifiante et palpitante en soi. La naissance de la connaissance humaine et sa contribution à notre compréhension du fonctionnement de l’univers sont extrêmement enrichissantes. Toutefois, les années passant, j’ai fondé une famille et rencontré des enfants atteints de maladies très graves comme la maladie de Duchenne de Boulogne; c’est alors que j’ai compris qu’il ne s’agissait pas de moi, mais de faire quelque chose pour venir en aide à ces enfants. En d’autres mots, faire tout mon possible pour améliorer les soins offerts à ces patients.
Q : Pourquoi la médecine régénératrice revêt-elle aujourd’hui une telle importance?
R : La recherche sur les cellules souches et les méthodes thérapeutiques concernant la médecine régénératrice vont métamorphoser l’exercice de la médecine. Nous allons exploiter le potentiel des cellules souches pour réparer les tissus endommagés par des maladies, des traumatismes ou le vieillissement. Cela englobe la production de nouvelles cellules, le traitement du diabète de type 1 ou encore l’amélioration des greffes de peau. Cela va avoir un impact considérable sur la qualité de vie des Canadiens. Et, selon moi, cela va aussi dire que des patients qui auraient autrement été hospitalisés ou seraient morts vont continuer d’être en bonne santé, de mener une vie productive, et d’élever leurs enfants jusqu’à ce qu’ils partent pour l’université, et de contribuer au Canada.
La recherche sur les cellules souches et les méthodes thérapeutiques concernant la médecine régénératrice vont métamorphoser l’exercice de la médecine.
Q : Cela vous fait quoi d’avoir rejoint en 2020 la prestigieuse Société royale?
R : C’est pour moi un très grand honneur, et je suis vraiment fier que cela arrive au sommet de ma carrière. Cette reconnaissance et ce choix par mes collègues et d’autres scientifiques ont une signification toute particulière. Il s’agit de la plus ancienne association scientifique au monde, fondée en 1660, qui a publié en 1665 la première revue scientifique avec comité de lecture. La Société royale continue de faire un excellent travail dans le monde entier, qu’il soit question de l’octroi de bourses ou de subventions de recherche, ou encore de toutes autres sortes d’activités de rayonnement et de sensibilisation.
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Q : Où vous trouver lorsque vous n’êtes pas au laboratoire?
R : Mon épouse et moi aimons passer du temps en famille dans notre chalet. Ce chalet appartenait à l’origine à sa famille, et nous l’avons rebâti pour en faire un chalet utilisable toute l’année. Il se situe au nord de Tremblant, quelque peu à l’écart. On y croise des animaux sauvages : des cerfs, des huards et des orignaux. Et puis, certaines années, nous voyons un ours. L’endroit est idéal pour décompresser et relaxer. Je peins, je lis beaucoup, et je profite de la compagnie de ma famille et de mes amis.